Les déchèteries
nucléaires civiles mondiales ont à ce jour en stock une masse de combustible
éteint de l'ordre de 350 mille tonnes, environ 8478 desquelles ont été
fissionnées (2,4%), pour un volume d'environ 17700 m3 tenant dans un
infernal cube de Babel de quelque 26 mètres de côté. A l'heure actuelle cette masse fissionnée grossit chaque année de l'ordre de 348 tonnes puisque
quelques 2,7 milliards de Mwé électronucléaires sont produits par an dans le
monde. Ces déchets de
l'industrie civile mondiale émettent à ce jour une colossale activité résiduelle
de 142,8 milliards de Curie, à savoir 20 Curie par habitant de ce monde (1,43E11 Ci/7E9 = 20,40 Ci soit presque 755
milliards de Bq par personne pour environ 51 gr de déchets chacune). 88,84% de
cette radioactivité artificielle relève des produits de fission
"longs" comme le strontium (111,27 t.), le césium (229,37 t.) ou le
prométhium (14,8 t.) et 11,16% est le fait des produits d'activation "très
longs" comme le plutonium (1600 t. de Pu239), l'américium (103,65
t. d'Am241) ou le curium (342 kg de Cm244). Ces déchets
éparpillés du Nord au Sud et d'Est en Ouest, dont la radioactivité occupera des
millénaires avant de s'estomper de manière significative, concentrent un
innommable potentiel radiotoxique de plus de 191 mille milliards de doses
létales par inhalation dont 179 mille
milliards dépendent des très perdurables produits d'activation et de 11 mille
milliards de doses létales par ingestion. Il y a en définitive là en réserve
assez de poisons "man made" pour, de science officielle, tuer chaque
être humain plus de 27000 fois par inhalation et plus de 1500 fois par
ingestion. Chacun des 7 milliards d'êtres humains vit en somme sans abri sous
la menace perpétuelle d'une silencieuse attaque atomique sale déclenchée par
l'atome de la paix.
Rapportée
aux 510 millions de km2 de la terre, cette activité correspond en
outre à 280 Ci par km2 (1,43E11 Ci/5,10E8 km2 = 280 Ci/km2
pour environ 693 gr de déchets bruts au km2) soit 10,36
millions de Bq de poisons radioactifs durables par mètre carré de planète contenus dans 693 microgrammes de déchets
bruts au m2 ! Compte tenu de la gamme des radioéléments impliqués
ces déchets détiennent le potentiel de pouvoir contaminer de manière
irrémédiable chaque km2 de la planète 260 fois au-delà de la valeur
d'évacuation impérative ! En somme ces macabres déchets "éteints"
sont pour l'heure, car ils vont croissant, en mesure de réduire à zone
interdite une superficie 260 fois plus vaste que notre navette spatiale terre. A
titre d'exemple signalons le Cs137 présent dans ces déchets à hauteur de
229,37 t. soit de 7,37E20 Bq. Il est à lui seul en mesure de réduire l'entière
planète 2,6 fois à zone interdite. Ou encore le vaillant Sr90 dont
les 111,27 t et les 5,68E20 Bq suffisent pour la transformer 8,5 fois en zone interdite. Il vaudra mieux
qu'aucun météorite malveillant ne s'abatte jamais plus sur notre globe. Car la
dispersion uniforme ne serait-ce que d'une infime partie (1/260 ème) de ces
déchets réduirait à néant toute possibilité de renaissance de la vie sur terre.
On est hélas loin des happy-end de rigueur des films catastrophe hollywoodiens.
Civil et militaire.
Ces 8478 tonnes de déchets de fission de
l'industrie civile se révèlent enfin presque 23 fois supérieures aux quelques
13 tonnes produites par les essais atmosphériques et souterrains et les 360
tonnes de déchets de fission que pourrait au plus produire comme fallout
l'arsenal atomique mondial ! (Le stock militaire mondial de matière
fissile hautement enrichie passe pour être de 1750 t. de U235 et 250
t. de Pu239 avec lesquelles il est possible de construire au plus environ
112 mille bombes "minimalistes" de type Hiroshima (25 kg de U235)
et Nagasaki (6 kg de Pu239) -70000 charges de 25 kg de U235
et 41700 charges de 6 kg de Pu239-. Si l'on concède généreusement un haut taux de fission de 18%,
en pratique seulement une fraction
mineure de la charge fissionne, autour de 10% en moyenne, porte à 360 tonnes
fissionnables sur les 2000 tonnes des charges pour 6,316 millions de Kt
réalisables (6316 Mt). -Cette
masse de 360 tonnes est en gros d'une douzaine de tonnes supérieure à la masse
annuelle fissionnée à l'heure actuelle dans le monde par les réacteurs électronucléaires.-
Une bombe A virtuelle de cette colossale puissance aurait une boule de feu de
57,6 km de diamètre. NB. 1 Kt ≈ 57 gr fissionnés.) L'atome de la paix
dispose donc bien de plus de venins contaminants que l'atome de la guerre ! Que
les états-majors en aient tiré les conséquences géo-stratégiques ou non,
l'atome de la paix est nettement plus superpuissant que l'atome explosif de la
guerre sur le plan des retombées radioactives qu'il peut mettre en acte. Pour arriver à tant l'atome
militaire devrait exploser plus de onze
millions huit cent mille "petites" charges atomiques de la puissance de celle qui a dévasté Hiroshima
(12,5 Kt. 0,7 kg fissionnés) pour disséminer sur terre autant de venins
artificiels que "l'atome de la paix" ne l'a déjà fait (1,487E8/12,5 =
1,189E7). Ou bien il lui faudrait détoner
plus de quatre vingt dix neuf mille "grosses" Tsar Bomba, la plus puissante ogive thermonucléaire connue,
capables de réaliser plus 50.000 Kt dont 1500 à travers la fission (85,5 kg
fissionnés), pour rejoindre une pareille quantité de produits de fission
(1,487E8/1500 = 99157). Ou bien encore il lui faudrait plus de 16500
"grosses" charges
de type Castle Bravo, une bombe H de
plus 14.000 Kt dont bien 9000 obtenus, et inégalés, à travers la fission (513
kg fissionnés), pour parvenir à fissionner 8478 tonnes de matière.
(1,487E8/9000 = 16526). Tout ceci va sans conteste au delà des capacités
matérielles de l'entier arsenal nuke fissionnel mondial présent et passé
réunis. L'atome de la guerre est incapable du fallout radioactif de l'atome de
la paix. L'atome de la paix est résolument imbattable !
La prolifération du fallout.
La doctrine internationale en matière nucléaire distingue
l'atome explosif de l'atome non explosif, l'atome de la guerre de l'atome de la
paix et pose la frontière infranchissable en pratique. L'atome non retraité de
la paix n'explose pas. Tout serait donc dit comme si l'atome guerrier n'était
dangereux que parce qu'il détone et non avant tout parce qu'il est radioactif.
Comme si l'immanquable fallout radioactif qui suit la détonation n'avait lui
aussi et à lui seul le pouvoir d'anéantir
autrement un territoire, en le laissant intact en apparence mais invivable là
où la radioactivité particulaire se dépose trop. Comme si de surcroit seulement
une explosion atomique savait engendrer un fallout radioactif. Comme si le déconfinement guerrier des déchets
civils pulvérisés était impossible, plus inoffensif et moins dissuasif que
l'arsenal militaire. Que l'atome de la paix n'explose certes atomiquement pas
(sagement empilé dans sa longue minigaine de zircaloy refroidie à l'eau borée)
ne l'empêche pas de retomber une fois en l'air, ne l'empêche pas d'exhiber si
besoin est la grandeur dissuasive (et persuasive) de son sale fallout
radioactif. Et si l'atome de la paix n'a effectivement pas le pouvoir explosif
immédiat de la bombe, il a néanmoins un pouvoir majoré de provoquer des
retombées qui contaminent sans remède à jamais. L'atome de la paix est
matériellement en mesure de transformer la terre entière en un vaste camp de
concentration atomique à l'air libre mieux que ne saurait le faire l'atome
militaire. Acclamer cet atome de la paix qui génère en plus grande quantité les
mêmes déchets que l'atome de la guerre c'est pour autant promouvoir
l'holocauste nucléaire que l'industrie civile prépare.
La
terreur asymétrique
Du point de vue de la sécurité des états même
cette doctrine de l'atome de la paix est gravement trompeuse car elle efface
l'impact stratégique du fallout atomique dont les bombes n'ont pas l'exclusive
et dont les déchets sont de fait l'émissaire premier. C'est une doctrine
suicidaire qui croit la superpuissance limitée à la détention de la bombe, qui confondant
dissuasion et explosion oublie que le terrifiant fallout n'est pas monopole de
la bombe. L'explosivité, en rien négligeable bien sûr, n'est cependant une
condition nécessaire de la superpuissance que pour ceux qui ignorent que les
bombes atomiques sont l'enfer non pour massacrer en masse d'un seul coup par la
seule force de leur détonation et de leur prompte radioactivité neutronique et
gamma, s'il en était ainsi l'entier arsenal atomique mondial ne suffirait pas à
emporter l'humanité car ses explosions ne couvriraient pas toute la surface
habitée, mais pour empoisonner de
manière irréversible le monde entier et continuer en silence à tuer bien après
la bataille pour des centaines de millénaires en propageant partout les résidus
aérosolisés des charges radioactives. Quoi qu'en dise la vulgate, une bombe
atomique tue plus à retardement que sur l'instant. Mais elle tue alors d'une
autre manière (surtout par contamination particulaire interne des êtres vivants
mais aussi par le rayonnement gamma artificiel qui s'élève des sols pollués),
sur une terrifiante durée et dans un espace sans frontières. Si l'arme atomique
est bien l'arme de la fin du monde par excellence c'est en raison de son
fallout ubiquitaire. Il est bon de s'en souvenir. On vit peu et mal sur une planète
réduite à zone interdite par ce vent mauvais. Le day-after des survivants n'est pas de tout
repos... (Les feux d'artifice atomiques n'en seront du reste pour eux qu'au début. Un fallout bien plus considérable, mais lui civil, les attend également dans la semaine car les réacteurs de l'atome de la paix disséminés dans le monde exploseront l'un après l'autre faute d'électricité, de maintenance et de refroidissement. Et, à mode de bouquet final, les innombrables "piscines de désactivation" et leurs milliers de tonnes de combustible radioactif prendront feu dans le mois hissant l'atmosphère au statut enviable de chambre à gaz atomique.) C'est donc bien cet indélébile fallout sale qui rend l'arme atomique,
et le nucléaire en général, si
démoniaque et non l'horrifiant carnage instantané ou l'amas de ruines immédiat promis
par sa détonation. Or ce sale fallout guerrier peut également et très
facilement surgir décuplé des déchets nucléaires de l'industrie civile. Il n'est
nul besoin d'une bombe atomique pour amorcer un fallout. John Gofman, co-découvreur du plutonium et ami
regretté de l'AIPRI, l'avait écrit tout cru et à la lettre, le nucléaire est
avant tout un "Poisoned Power". Il n'y a dès lors meilleur furtif guerrier
du fallout que l'atome de la paix. Il n'y a meilleure prolifération directe de
la dissuasion sale que l'atome de la paix. L'AIEA arme quiconque. La guerre asymétrique
sale prolifère sans moratoire sous sa tutelle.
L'atome de la paix constitue par conséquence la plus grave menace atomique
concevable, plus superpuissante en terme de contamination, plus discrète (les
retombées n'ont pas le bruit des bombes) et plus élémentaire que la menace
atomique militaire. L'atome de la paix fabrique sans entraves les poisons de la
guerre radiologique sale tôt comprise avant la bombe en 1943 dans le memorandum
"Use of radioactive material as a military weapon" du brigadier général
Leslie Groves, responsable du "projet Manhattan". L'atome de la paix
n'est en définitive que la poursuite de la guerre atomique totale par d'autres
et plus rudimentaires moyens. L'atome de la paix prépare l'enfer sur terre.
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